mardi 18 mai 2010

La récolte du coiffeur

J'ai souvenance, lorsque je n'avais pas encore dix ans, d'avoir enduré bien des fourberies de la part de certaines grandes personnes, la déloyauté chez le coiffeur étant le cas le plus courant, et le plus flagrant.
A cette époque lointaine, il y avait dans le giron du Bois-Verna, cinq salons de coiffure, dont les propriétaires, bizarrement, avaient tous des noms anglo-saxons:
Mr. French, Mr. Milfort, Mr. Goldman, Mr. Philip, ces quatre premiers étant domiciliés à Turgeau, puis un cinquieme, Mr. Harris Jones [plus connu comme Ti Jones], qui avait son salon au Petit-Four.
Les enfants devaient se taire quand ils voyaient un client qui était arrivé après eux, passer avant.
"--Sé fout timoun ou yé"
Trois époques de l'année, dont la Rentrée des classes, la Noël, et le début des grandes vacances, étaient considérées comme étant les trois grandes récoltes des coiffeurs. J'en ai connu un qui, pour ne pas que ses jeunes clients, fatigués de trop attendre leur tour, s'en aillent frapper chez un confrère, avait eu le cynisme de leur tondre la moitié du crâne, l'enfant se voyant obligé de rester ; autrement, il serait la risée des badauds. Ce chantage lui garantissait que tous les petits resteraient docilement à leurs places!
Cette infame déloyauté avait été pratiquée chez Goldman et French ; Ti-Jones, par contre, moins déloyal que ces deux-là, était sadique toutefois, nous tirant par les oreilles lorsque nous tournions innocemment la tête pour admirer les tortues qui vegetaient dans un grand bocal de verre, or il n'y avait pas que ce supplice ; il y avait encore celui de la tondeuse, celle de Ti Jones ayant cette particularité, qu'elle vous mordait la peau à la nuque...
Mais on n'en est pas morts, alors? Vive l'enfance !

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