jeudi 5 novembre 2009

Détrousseur de cadavres

Cette histoire a eu lieu dans une entreprise funéraire, derrière le guichet du préposé à la réception des habits [celui ou celle qui reçoit les vêtements que vont revêtir les défunts, avant de se faire voir dans leur ultime parade, l’exposition proprement dite], au son de beaux chants grégoriens choisis pour la circonstance.
Ce jour-là, cet employé venait de recevoir un magnifique complet bleu en casimir anglais, que les frères et sœurs du défunt lui offraient pour que ses obsèques soient une vraie réussite. Ceux-là vivant en diaspora, ne pouvant malheureusement pas être présents pour l’accompagner à sa dernière demeure, feraient chanter une messe dans leur paroisse bostonienne, pour le repos de l’âme de leur regretté disparu.
Ayant remis au porteur du costume un reçu qu’il venait de gribouiller, notre buraliste, qui ne perdait jamais un seul détail de toute situation qui se présentait, se réfugia derrière un paravent, où il quitta promptement le pantalon bleu qu’il portait ce jour-là, pour enfiler celui que l’on venait de lui confier.
Les choses s’étaient bien passées, le défunt ayant eu la vedette espérée. Vers la fin de la journée, le charognard qui n’y pensait déjà plus, referma tranquillement son bureau, puis affronta les embouteillages quotidiens pour regagner ensuite son domicile. Il avait la tête ailleurs lorsque sa femme lui rappela, sur son portable, qu’il n’y avait déjà plus de lait au frigo, et qu’il devrait en acheter en venant. L’homme prit note, et ne voulant pas s’arrêter pour si peu, en profita pour faire une bonne fois les emplettes de la semaine.
Il était à la caisse, prêt à payer, quand il fit le geste de tirer de sa poche son portefeuille … se tapotant toutes les autres poches comme un clown, ce qui fut vraiment inutile, aussi vrai que les appointements qu’il avait recus le matin, se trouvaient maintenant six pieds sous terre !

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